Accéder au contenu principal

Juridique

La fixation de la rémunération du gérant associé d’EURL : une nécessité !

La chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 29 novembre 2023, est venue rappeler que la rémunération du gérant de SARL, fût-il l’associé unique, doit être déterminée par les statuts ou par une décision de la collectivité des associés.

Une évidence qui avait pu être oubliée en pratique, notamment après l’arrêt relativement libéral de la même chambre, en janvier 2019. Dans cette affaire, la Cour avait admis que la rémunération du gérant puisse être autorisée après son versement.
 

Rappel des faits :

Le gérant associé unique d’une EURL a perçu une rémunération au titre d’un exercice, au cours duquel il a cédé l’intégralité de ses parts sociales. Contrairement aux années précédentes, cette rémunération n'a pas été approuvée par une décision de l’associé unique après la clôture de l’exercice concerné.
L’acquéreur le poursuit en remboursement de cette rémunération et des charges sociales afférentes, au motif que ce versement n’a pas été approuvé par décision des associés, conformément aux statuts.
 

Les décisions :

Une cour d’appel rejette cette demande, retenant que l’acquéreur avait eu connaissance de tous les éléments comptables utiles avant la cession et ne pouvait donc pas ignorer que la rémunération du gérant avait toujours été approuvée après la clôture des comptes et que le gérant, qui n’était plus associé depuis la cession, ne pouvait plus approuver sa rémunération a posteriori comme il le faisait habituellement.

La Haute Juridiction (Cour de cassation), casse l’arrêt d’appel : même si le gérant était associé unique et de bonne foi, il aurait dû se conformer aux statuts qui imposaient que la rémunération soit déterminée et approuvée par décision des associés.
 

Ce qu’il faut retenir….

 

La solution de la Cour de cassation ne surprend pas vraiment car elle se contente finalement de rappeler ce que la jurisprudence prévoit pour les SARL : la rémunération du gérant est déterminée soit par les statuts, soit par une décision de la collectivité des associés.
Mais, bien que la Cour de Cassation fasse preuve de souplesse en admettant que l’approbation de la rémunération puisse intervenir après son versement, il faut tout de même que cette approbation intervienne, peu important que l’ancien gérant et associé ait été de bonne foi.

La problématique est connue dans la pratique : lorsqu’un associé de SARL ou d’EURL, par ailleurs gérant, cède la totalité de ses parts dans une société, il doit s’assurer que la rémunération de son mandat social pour l’exercice en cours est approuvée, par les statuts (assez rare), par une décision de l’associé unique, ou par une assemblée générale des associés, voire une consultation écrite des associés ou un acte unanime. S’il ne s’en assure pas préalablement à la cession, il ne pourra pas régulariser la situation a posteriori car ce seront les cessionnaires qui disposeront de la qualité d’associé ; ces derniers n’auront pas toujours la volonté d’approuver sa rémunération passée.

Cette erreur peut coûter cher au cédant : en l’absence de détermination conforme de la rémunération, ce dernier est tenu de rembourser à la société l’intégralité des sommes concernées.

Pour résumer, le gérant associé unique d’une EURL qui a perçu, même de bonne foi, une rémunération sans que son versement ait été approuvé, conformément aux statuts, par une décision des associés, doit la rembourser.
De plus, pour assurer pleinement la régularité du processus d’attribution de la rémunération du gérant associé unique d’EURL, il convient également que la décision soit consignée dans le registre des décisions. En effet, les décisions unilatérales de l’associé unique, y compris celles relatives à la rémunération des gérants, doivent être consignées dans ce registre ; à défaut, elles peuvent être annulées à la demande de tout intéressé (C. com. art. L 223-31, al. 3 et 4).

 

Comment éviter de subir de si lourdes conséquences ?

En pratique, la rémunération du gérant devra être déterminée avant la réalisation définitive de la cession, notamment :

  • en prenant une décision des associés (ou de l’associé unique) préalablement à la cession afin de déterminer la rémunération versée au gérant pour l’exercice en cours. L’acte qui fixe la rémunération sera utilement annexé à l’acte de cession de parts sociales ;
  • en prévoyant le montant et les modalités de rémunération dans les statuts de la société. C’est une solution qui n’est pas particulièrement conseillée du fait de la publicité des statuts et de la nécessité d’effectuer un dépôt d’acte en cas de modification;
  • en fixant le montant et les modalités de rémunération dans une décision des associés (ou de l’associé unique) préalable à son versement, sans la limiter à un exercice donné. Dans cette situation, le dirigeant réduit fortement le risque d’une contestation ultérieure. 

C’est la solution traditionnelle la plus sécurisante, même si elle peut manquer de souplesse en cas de variation de la rémunération du gérant d’un exercice sur l’autre. Le montant de la rémunération pourra ensuite être modifié par une autre décision des associés, se substituant à la première, voire par une décision ponctuelle de prime, s’ajoutant à la rémunération habituelle.
 

Ces contenus peuvent vous intéresser

Les arrêts canicule officiellement intégrés au chômage intempéries du BTP

En savoir plus

Partage de la valeur en cas de bénéfices réguliers dans les petites entreprises

En savoir plus

Travailleurs étrangers sans autorisation de travail : une nouvelle amende administrative

En savoir plus